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Carlos Kleiber (1930-2004) Hommage au chef-d’orchestre autrichien
Biographie – Discographie, septembre 2004

Carlos Kleiber, qui fut qualifié de "plus grand chef depuis Arturo Toscanini" par le quotidien américain New York Times, a dirigé les plus prestigieux orchestres symphoniques du monde, dont ceux des Opéras de Vienne et de Bavière, le Metropolitan Opera de New York, la Scala de Milan et celui de Covent Garden à Londres.

Biographie


Fils du chef autrichien Erich Kleiber, Carlos Kleiber, né le 3 juillet 1930 à Berlin, est mort des suites d’une longue maladie, selon des membres de sa famille le 13 juillet en Slovénie, à l’âge de 74 ans, et a été inhumé samedi à Konjsica, à l’est de la Slovénie. Il s’est montré tout au long d’une vie hors normes le digne fils de son père, Erich Kleiber, grand chef d’orchestre autrichien parti en exil en Argentine en 1937 pour s’opposer au nazisme.

Carlos Kleiber, qui fut qualifié de "plus grand chef depuis Arturo Toscanini" par le quotidien américain New York Times, a dirigé les plus prestigieux orchestres symphoniques du monde, dont ceux des Opéras de Vienne et de Bavière, le Metropolitan Opera de New York, la Scala de Milan et celui de Covent Garden à Londres.

"Nous avons perdu le plus grand dirigeant de l’époque contemporaine", a déclaré à l’agence de presse autrichienne APA le directeur de l’Opéra de Vienne, Ioan Holender. "Sa disparition marque également la fin d’un de mes rêves : le faire revenir un jour à Vienne." "La perte pour la musique classique était énorme" depuis plusieurs années, car Carlos Kleiber ne dirigeait plus, a encore dit M. Holender.

L’intransigeance aura été le point commun entre le père et le fils. Directeur général de la musique de l’Opéra d’Etat de Berlin de 1923 à 1934, Erich Kleiber considéra de son devoir de s’opposer aux lois raciales des nazis. De retour en 1954, en Allemagne de l’Est, il démissionna à nouveau de ses fonctions officielles, pour protester cette fois contre l’immixtion du pouvoir politique communiste dans le domaine artistique.

  • Une vie plutôt discrète

Carlos, né le 3 juillet 1930 à Berlin, avait hérité des certitudes de son père, et surtout de son talent pour obtenir le meilleur d’un orchestre. On a écrit de lui qu’il avait "l’inspiration dionysiaque" de l’Allemand Wilhelm Furtwaengler et le "sens architectural" de l’Italien Arturo Toscanini, deux des chefs légendaires de la première moitié du 20e siècle.

Le fils, cependant, à la différence du père, qui se considérait comme un missionnaire du répertoire germanique, a refusé toute sa vie, au risque de vivre chichement, de se produire fréquemment. Ces dernières années, les activités à l’opéra et au concert de cet "horloger des partitions", de ce "démiurge de la baguette", s’étaient de plus en plus raréfiées. Vénéré par les musiciens, adoré par les mélomanes, il s’entourait de mystère, n’accordant aucune interview.

Sa légende commença alors à se bâtir. On racontait même que Carlos Kleiber attendait de constater le déficit de son compte en banque pour solliciter les organisateurs qui n’attendaient que cela. En deux concerts, ses finances étaient renflouées. Ses enregistrements chez Deutsche Grammophon, tant dans le domaine symphonique que dans le domaine lyrique (La Traviata de Verdi, le Freischütz de Weber), gardent témoignage de son élégance.

En 1935, sa famille s’était enfuie de l’Allemagne nazie pour s’établir en Argentine où le jeune Carlos a reçu son éducation musicale à partir de 1950. Après avoir perdu sa nationalité autrichienne et été fait citoyen d’honneur en Argentine, il avait regagné sa nationalité autrichienne en 1980. Il avait fait ses début au pupitre en 1952 à La Plata, en Argentine, avant d’aller en Suisse pour étudier la chimie à Zurich, sur l’insistance de son père. Il persévère en musique et fait ses classes comme répétiteur et chef assistant à Düsseldorf, Stuttgart, Zurich, Munich.

Chef d’orchestre adulé et courtisé, Carlos Kleiber laisse très peu d’enregistrements, mais tous de très grande qualité. Il fuyait les journalistes et a vécu ses dernières années retiré dans le calme de sa villa munichoise, indifférent aux ponts d’or que lui offraient régulièrement Salzbourg, Vienne ou Berlin. Munich réussit à le retenir à l’Opéra d’Etat de Bavière, de même que l’Opéra et la Philharmonie de Vienne. Il fut moins présent à la Scala de Milan, au Covent Garden de Londres et au Festival de Bayreuth, où il dirigea cependant Tristan de Wagner de 1974 à 1976.


Discographie


Ludwig van Beethoven
Symphonie n°6 “Pastorale”
Bayerisches Staatsorchester (1983)
1 CD Orfeo
MUS 3 BEE 24
Voici une Sixième torrentielle, vertigineuse. On ne se lasse pas d’admirer l’insoutenable légèreté de deux premiers mouvements denses et fluides à la fois, de cette « réunion de paysans » cravachée, sans reprise, qui ne devient joyeux qu’au sens le plus dionysiaque, voire orgiaque, trouvant son dénouement dans un orage plus tourbillonnant que dévastateur et ne s’apaisant que dans une paradoxale fébrilité.

Antonin Dvorak
Concerto pour piano
Sviastoslav Richter, piano
Bayerischen Rundfunks Orchester
1 CD Emi
MUS 3 DVO 19.11
Rencontre inespérée entre deux titans de la musique à propos d’une œuvre longtemps méprisée et méconnue. Richter, toujours lucide et impitoyable avec lui-même, écrit dans ses carnets, le 8 mars 1977. « Le Concerto de Dvorak n’a pas marché comme je l’aurais voulu : Carlos Kleiber et moi étions quelque peu crispés et appliqués au moment de l’enregistrement, et du coup, l’œuvre (extrêmement difficile pour le piano) a perdu de sa fraîcheur. J’en suis fort attristé, car je l’aime énormément. Mais il n’y a rien à faire et le disque va sortir. »

Josef Strauss
Concert du Nouvel an à Vienne en 1989
Wiener Philharmoniker
2 CD Cbs
MUS 3 STR 22
Kleiber a de ce répertoire une vision somme toute classique, avec ce qu’il faut de rubato, de finesse et de goût. Le style est constamment juste, exact, parfait. Et les Philharmoniker laissent tout le monde sur place, ne serait-ce qu’à cause d’un soyeux sonore qui n’appartient qu’à eux. La virtuosité du chef est extravagante, à proprement parler inouïe, et toutes les polkas éblouissent par leur incroyable facilité d’élocution, par leurs miracles d’articulation et de phrasés déployés dans un cadre rythmique pourtant serré.

Richard Wagner
Tristan et IsoldeRené Kollo (Tristan), Kurt Moll (Roi Marke), Margaret Price (Isolde), Dietrich Fischer-Deiskau (Kurwenal) ; Staatskapelle Dresden
4 CD DGG (1982)
MUS 3 WAG 35
A l’opposé de Furtwängler et de Karajan, Carlos Kleiber exalte la vérité dramatique de Tristan dans une transparence des textures instrumentales médianes, une ductilité inouïe de l’orchestre, un flux irrésistible de continuité et de variété. Au disque, les chanteurs n’ont pas toutes l’autorité des grands du passé, Margaret Price plus mozartienne, Kollo moins exalté qu’en scène. Mais ces réserves admises, il y a l’incessant frémissement de la direction de Kleiber, qui insuffle à tous les interprètes une poésie, une idéalité, surtout, jamais rencontrées ailleurs. Ce Tristan est porté à l’incandescence par un chef de génie.

Carl-Maria von Weber
Der Freischütz
Gundula Janowitz (Agathe), Peter Schreier (Max), Edith Mathis (Anne), Theo Adam (Caspar), Rundfunkchor Leipzig, Staatskapelle Dresden
2 CD DGG (1973)
MUS 3 WEB 35
C’est une très belle réussite. Gundula Janowitz est une Agathe exceptionnelle de sensibilité et d’intelligence. Peter Schreier est un Max vaillant et rêveur, Theo Adam incarne admirablement Caspar. Edith Mathis campe une charmante Annchen, dont on regrette un peu, cependant, le manque d’abattage. Le problème des passages parlés est résolu habilement : les comédiens ont un timbre qui ne s’éloigne pas de celui des chanteurs qu’ils doublent. Le chef d’orchestre sait créer un véritable climat, se montrant tour à tour dramatique et lyrique, toujours électrique.


Vidéographie


Richard Strauss
Der Rosenkavalier (le chevalier à la Rose), opéra en 3 actes
Félicity Lott (La Maréchale), Anne-Sophie von Otter (Octavian),Barbara Bonney (Sophie), Kurt Moll (Ochs), mise en scène : Otto Schenk, réal. : Horant H. Hohlfeld (1994)
2 DVD Vidéo (3 H13)
MUS 3 STR 35
Kleiber fait preuve ici d’une imagination toujours en éveil, d’une élégance innée et d’un art consommé des apparences tout en maîtrisant avec un sourire irrésistible le flot musical d’un somptueux Wiener Philharmoniker. Il a ,face à lui, un trio féminin d’une classe exceptionnelle et une équipe d’une solidité proverbiale. Il existe un autre Rosenkavalier munichois (avec Lucia Popp, Gwyneth Jones et Brigitte Fassbaender) publié en 1979 par Deustsche Grammophon, que l’on espère voir rééditer sur le marché à l’occasion de sa disparition.

Johann Strauss
Die Fledermaus (La Chauve-souris), opérette en 3 actes
Eberhard Wächter (Eisenstein), Pamela Coburn (Rosalinde), Benno Kusche (Frank), Brigitte Fassbaender (Orlofsky, Chor der Bayrischen Staatsoper, Bayerisches Staatsorchester ; mise en scène : Otto Schenk, réal. : Brian Large (1987)
1 DVD Vidéo (2h35)
MUS 3 STR 37
Sviastoslav Richter écrit le 13 avril 1993, dans ses Carnets, après avoir visionné le film : « Impossible d’imaginer meilleure exécution de cette extraordinaire opérette. Tout y est : la musique, la scène, le climat viennois ! Qui en est responsable ? D’abord, bien entendu, Carlos, mais aussi les merveilleux chanteurs et Otto Schenk, le metteur en scène. Merveilleux !!! »


Bibliographie


Sviatoslav Richter
Ecrits, conversations
éd. Par Bruno Monsaingeon
Van de Velde/Actes Sud, 1998.(Cd inclus)
MUS 786.2 RIC
On l’a vu, le grand pianiste russe parle souvent de Carlos Kleiber qu’il considérait comme le plus grand chef d’orchestre contemporain, même avant Karajan.

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