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Hokusaï
Présentation et sélection bibliographique, octobre 2014

En pratique

Exposition, Grand Palais du 1er octobre 2014 au 18 janvier 2015

6 place Iéna - 75016 Paris
Ouvert tous les jours, sauf le mardi de 10h00 à 20h00
Nocturne jusqu’à 22h00 le mercredi, jeudi, vendredi et samedi.

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L’exposition


Katsushika Hokusai (1760-1849) est aujourd’hui l’artiste japonais le plus célèbre à travers le monde. Son oeuvre peinte, dessinée et gravée incarne la spiritualité et l’âme de son pays, particulièrement ses estampes de paysages, synthèse remarquable entre les principes traditionnels de l’art japonais et les influences occidentales.

Conçue en deux volets, l’exposition présente 500 oeuvres exceptionnelles, dont une grande partie ne quittera plus le Japon à compter de l’ouverture du musée Hokusai, à Tokyo en 2016.

Source : http://www.grandpalais.fr






Katsushika Hokusaï (1760-1849)


Hokusaï - Autoportrait (Paris, Musée du Louvre)Katsushika Hokusaï est sans doute le plus célèbre des peintres et dessinateurs japonais de sa génération, le plus extraordinaire, et celui dont la renommée a le plus rapidement franchi les mers. Artiste polyvalent et complet, spécialiste de l’Ukiyo-e (terme appliqué durant l’époque Edo pour désigner l’estampe ainsi que la peinture populaire et narrative, signifiant « images du monde flottant ») s’étant aussi réalisé dans l’écriture, son nom est depuis longtemps populaire en Europe et sa vie apparaît comme une quête touchante de la perfection. Il est parfois vu comme le père du "manga", mot qu’il a inventé et qui signifie approximativement "esquisse spontanée".

Cet artiste du peuple est mort presque ignoré, sinon méprisé de la classe aristocratique. La vogue énorme de son talent dans la classe populaire ne s’est guère étendue au delà des lettrés et des dilettantes de la petite bourgeoisie. La foule de ses admirateurs se recrutait principalement parmi les marchands, les artisans, les courtisanes et les habitués des maisons de thé de Edo (1603-1867, actuelle Tokyo). Si son influence resta quasi inexistante sur les écoles d’art classique de Kyoto, sur les nobles et le monde de la cour, elle fut, au contraire, décisive, sur l’évolution de l’Ukiyo-e et sur les destinées des arts décoratifs, tels que l’imagerie en couleurs et la décoration des objets usuels. Aujourd’hui, le Japon en est encore l’héritier. Hokusaï marque la dernière étape de l’art national Nippon en estampe de paysage, avant l’invasion des modes et des idées européennes.

L’ukiyo-e, la peinture dite du « monde éphémère »

Utamaro - Trois beautés de notre tempsL’estampe japonaise est un travail d’équipe, le dessinateur (eshi) fournit son modèle au graveur (horishi) qui transpose l’œuvre sur bois et la donne à l’imprimeur (surishi). De l’habileté technique de ces trois intermédiaires dépend la qualité de l’œuvre finale, faite pour être vendue à un public le plus large possible. L’art du Ukiyo-e, images du monde flottant, est né à Edo. Il reflète la passion du théâtre, des restaurants, des geishas et des shunga (images érotiques), mais aussi l’importance de la nature et de la tradition. Les thématiques sont souvent liées à la représentation des acteurs de kabuki mais aussi à l’amour, scènes érotiques et idéal féminin aux formes fragiles. Les Bijin, images de belles femmes, évoquent à la fois un monde de plaisir et d’éphémère. Que ce soient des courtisanes, des prostituées ou de simples femmes, leur attitude, leurs vêtements et la façon dont elles sont maquillées, constituent un langage qu’il est nécessaire de décrypter pour comprendre l’art japonais de l’époque Edo.

Enfin, c’est le paysage qui triomphe au XIXème siècle. Hokusaï connaît la peinture occidentale et la perspective linéaire, en retour, le maître séduit les peintres symbolistes français, comme Bonnard, ou post-impressionnistes, comme Van Gogh. Les estampes japonaises circulaient déjà en France dans les années 1860. Introduites par des artistes et des marchands spécialisés, elles arrivèrent en masse (après 1868), lorsque le Japon ouvrit ses frontières sur le monde.

Hokusaï manga

Hokusaï mangaCollection d’albums dont l’idée naquit un jour où, discutant dessin avec un de ses élèves, Hokusai illustra son propos de centaines de croquis. Édités en 1814, ils formèrent le premier volume des "Hokusai Manga". Le succès fut tel qu’au cours des cinq années qui suivirent, le maître y adjoignit neuf autres cahiers. Quinze ans plus tard étaient publiés deux autres albums, puis en 1849, année de la mort de l’artiste, paraissait le volume XIII. Vers 1875 était édité le volume XIV, rassemblant des dessins inédits, et, en 1878, un dernier cahier, réunissant nombre d’esquisses déjà parues dans d’autres recueils.

Imprimés en noir, rehaussés de gris et de rose, ces dessins couvrent les feuillets sans cadrage précis : des études à échelle réduite voisinent avec des esquisses de grandeur moyenne et des compositions en pleine page ou sur double page. Dans leur désordre apparent, elles gardent la saveur de la spontanéité, méritant bien leur titre : « Dessin au gré de l’idée », « Cahiers de caprice ». À l’exception de rares volumes dédiés à un sujet précis — architecture (vol. V), paysage (vol. VII) ou caricature (vol. XII) —, chaque cahier aborde une diversité de thèmes telle que Goncourt parle de « milliers de reproductions de ce qui est sur terre, dans le ciel, sous l’eau, ces magnifiques instantanés de l’action, du mouvement de la vie remuante de l’humanité et de l’animalité ». Pourtant, de ce foisonnement ressort un thème central : l’homme, de qui Hokusai ne s’est jamais lassé de capter, avec humour et tendresse, les attitudes et les sentiments.

Condensé de son œuvre graphique, les plus belles pages de la Manga nous livrent le meilleur de Hokusai, dessinateur génial et jamais égalé, dans une leçon de dessin qui a gardé toute son actualité.

Les trente-six vues du mont Fuji et La grande vague

Les Trente-six vues du Mont Fuji sont une série de 46 estampes réalisées par Hokusaï (1760-1849) et dont les dates d’édition s’étendent entre 1831 à 1833. Elles représentent le Mont Fuji depuis différents lieux, suivant les saisons. Cette série est aujourd’hui très célèbre car elle marque l’intégration dans les thèmes de la tradition japonaise (la plus ancienne de nombreuses représentations artistiques du Mont Fuji semble datée du XIème siècle) des modes de représentation occidentaux, et en particulier de la perspective utilisée dans la peinture occidentale. Vers 1830, Hokusaï contacte probablement l’éditeur Nishimuraya Yohachi pour lui soumettre son projet de graver une série de grandes estampes de paysage sur ce thème unique. Dix estampes paraissent d’abord, dont « La grande vague au large de Kanagawa », « Le Fuji par temps clair » et « L’orage sous le sommet », souvent considérées comme les trois plus célèbres estampes japonaises et dont le succès fut immédiat. Les Trente-six vues du Mont Fuji est une des premières séries entièrement consacrée au paysage mais réalisée en grand format (oban) et en cela Hokusaï a révolutionné la peinture de l’époque. Cependant même si le Mont Fuji est l’élément principal de la série, il ne constitue pas son but ultime, le thème central qui habite ces estampes étant l’illustration du rapport entre l’homme et la nature : « Le thème des Trente-six vues du Mont Fuji est le rapport entre l’homme et la nature, et la plus grande invitation à approfondir ce rapport se trouve là, justement, où l’homme n’est pas représenté (ce qui ne l’empêche pas d’être présent - à travers l’œil du spectateur). » (Kenneth White)

Hokusaï - Le pêcheur de Kajikazawa

Le bleu de Prusse « la révolution bleue » des années 1830

Les Trente-six vues du Mont Fuji ont connu un très grand succès notamment grâce à la qualité plastique des estampes, à leur originalité ; deux aspects de cette série ont surtout fait sa renommée : l’utilisation du Bleu de Prusse ainsi que l’influence des modes de représentation occidentaux. Le bleu de Prusse, appelé également bleu de Berlin, était un pigment récemment importé de Hollande depuis 1820, que l’on retrouve dans les Trente-six vues du Mont Fuji notamment dans « La grande vague ». Il transforma l’aspect des estampes : il fut utilisé pour la première fois par le peintre en 1829 et connut un succès immédiat.

Les artistes appréciaient l’utilisation de cette couleur d’origine synthétique qui ne risquait pas de perdre de son intensité avec le temps ; ils l’utilisèrent d’autant plus qu’ils étaient condamnés par la censure à n’utiliser qu’un nombre restreint de couleurs et avaient réalisé les ressources infinies qu’ils pouvaient tirer de ce seul bleu. Le bleu de Prusse était très vite devenu tellement prisé que l’éditeur d’Hokusaï lança une édition, en aizuri-e (estampes bleues), de certaines des Trente-six vues du mont Fuji avant d’éditer la série avec les couleurs complémentaires. Toutes les estampes de la série ne sont pas fondées sur ce pigment mais une certaine tonalité bleue se dégage de l’ensemble, « le bleu, peut-être, de l’espace et de l’éternité (avec l’avantage matériel que ce bleu de Prusse gardait effectivement longtemps son intensité, alors que d’autres bleus pâlissaient vite). » (Kenneth White).

L’influence des modes de représentation occidentaux

Les Trente-six vues du Mont Fuji ne sont pas tant célèbres pour la grande diversité des thèmes représentés mais plutôt parce que certaines de ces estampes expriment une vision du paysage purement japonaise alors que d’autres, de manière équilibrée et naturelle, utilisent les principes de la perspective occidentale. Ainsi dans son ouvrage « L’estampe japonaise », Nelly Delay souligne cet aspect que l’on retrouve dans les estampes de la série : « Il émane d’elles tant de naturel et de spontanéité que l’on imagine mal qu’elles puissent être l’aboutissement d’un projet déterminé. Or, dès que cette idée vient à l’esprit, l’entre-croisement savant des lignes apparaît clairement. L’accent d’un point focal, d’où rayonne un éventail de directions pour le regard, la force des diagonales, qui divisent la composition en plans, prouvent que ces estampes, au-delà de leur climat poétique, s’adresse à notre sensibilité, tout autant qu’à notre esprit. Cheminer à l’intérieur de ces paysages est dès lors d’un intérêt accru. »

La forme, la composition ont toujours été très importantes pour Hokusaï. Dans la série des Trente-six vues du Mont Fuji, les formes géométriques comme le carré ou le rectangle, le cercle et le triangle jouent un rôle essentiel dans la construction des scènes représentées. Hokusaï utilise par exemple dans l’image du pêcheur de Kajikazawa une construction triangulaire : le triangle du Mont Fuji se retrouve dans le triangle formé par le rocher, le pêcheur et ses lignes. Quand il représente la scierie de Honjo, il construit son estampe avec des formes géométriques simples comme des carrés et des lignes droites. Hokusaï incorpore ces formes géométriques simples dans un climat poétique. L’influence de mode de représentation occidentaux se retrouve plus particulièrement dans « La rue Seruga à Edo » dans laquelle Hokusaï adopte une perspective presque purement occidentale en plaçant le sommet du Mont Fuji entre les deux bâtiments du magasin Mitsui dont les ouvriers couvrent le toit.

Les Trente-six vues du Mont Fuji ont révolutionné la peinture japonaise - notamment en plaçant le paysage au rang de sujet à part entière -, mais cette série a également été une source d’inspiration très importante pour les peintres occidentaux japonisants du XIXème siècle. On la retrouve chez de nombreux peintres, qui en firent même parfois collection : Van Gogh, Monet, Degas, Renoir, Pissaro, Klimt, Giuseppe de Nittis ou Mary Cassatt. « Le Pont sur un étang de nymphéas » de Monet (huile sur toile de 1899) semble s’inspirer de l’architecture des ponts telle qu’on la retrouve dans plusieurs des estampes de la série de Hokusaï. « La Grande Vague au large de Kanagawa », quand elle a été découverte par l’Europe dans la deuxième moitié du XIXème siècle, a influencé de nombreux peintres et certains poètes : pour Debussy cette estampe constitue sa plus grande source d’inspiration pour composer « La mer ».


Bibliographie


Hokusaï
Henri-Alexis Baatsch
Hazan, 2008 (Bibliothèque Hazan)
ART 769.952 HOK

Hokusaï
Matthi Forrer
Bibliothèque de l’image, 1996
ART 769.952 HOK

Hokusaï "cent poètes"
Peter Morse
Anthèse, 1989
ART 769.952 HOK

Hokusaï
Edmond de Goncourt
Flammarion, 1988
ART 769.952 HOK

Hokusaï "la menace supendue" 1831
in Images d’Orient
Réalisé par Alain Jaubert
Arte vidéo, 2004 (Palettes)
ART 769.95 JAU - DVD

Hokusaï, le vieux fou d’architecture
Seuil : Bnf, 2014
Nouveauté - ART 769.952 HOK

La manga
Katsushika Hokusaï
Hazan, 2014
En commande

  • L’estampe japonaise et son influence

Ukiyo-e ou L’estampe japonaise : Sotatsu, Ando, Utamaro, Hokusaï et Hiroshige
Francesco Morena
Citadelles & Mazenod, 2008
ART 769.952 MOR

Images du monde flottant : peintures et estampes japonaises, XVIIe-XVIIIe siècles
catalogue de l’exposition du Grand Palais, 2004-2005
RMN, 2004
ART 769.952 IMA

Hiroshige : un impressonniste japonais
Marianne Grivel
Albin Michel, 1984
ART 769.952 HIR

Hiroshige : invitation au voyage
Nelly Delay, Dominique Ruspoli
A propos, 2012
ART 769.952 HIR

Le tokaïdo : de Tokyo à Kyoto avec Hiroshige
Bibliothèque des arts, 1986
ART 769.952 HIR

Un banc de poissons
Hiroshige
Herscher, 1983
ART 769.952 HIR (magasin - disponible sur demande)

Un concert d’oiseaux
Utamaro Kitagawa
Herscher, 1982
ART 769.952 UTA (magasin - disponible sur demande)

Japonisme
Siegfried Wichmann
Chêne : Hachette, 1982
ART 709.034 WIC

La collection d’estampes japonaises de Claude Monet à Giverny
Bibliothèque des arts, 1983
ART 769.952 COL

Henri Rivière : entre impressionnisme et japonisme
Valérie Sueur-Hermel
BnF, 2009
ART 759.057 RIV

Toulouse-Lautrec et le japonisme
Catalogue de l’exposition, musée Toulouse-Lautrec, Albi, 1991
Musée Toulouse-Lautrec, 1991
ART 759.05 TOU

  • Pour les enfants

Hokusaï : voyage dans le monde flottant
Caroline Larroche
Palette, 2010 (L’art et la manière)
JEU 769.952 LAR

La Grande vague : Hokusaï
Véronique Massenot
CRDP, 2010 (Pont des arts)
A MAS

Le vieux fou de dessin
François Place
Gallimard, 1997 (Drôles d’aventures)
Roman illustré - J PLA

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